8 janvier 2012
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Diffusée pour la première fois en septembre 1993, sur les petits écrans français, « Code Quantum » a marqué les esprits de nombreux téléspectateurs notamment par sa relecture originale de l’Histoire Américaine. L’aventure dura cinq saisons, soit 96 épisodes.
Silver Screen vous propose de nous replonger dans les aventures du Dr Sam Beckett. « Oh Bravo ! ».
SYNOPSIS
En 1995, le Dr Samuel Beckett dirige dans le désert de Stallion Gate, au Nouveau Mexique, un projet top secret, commandité par le gouvernement américain et baptisé Code Quantum (Quantum Leap). Pressé de fournir des preuves tangibles de ses théories sous peine d’en voir le financement supprimé, le scientifique entre prématurément dans le prototype de son accélérateur temporel.
Malheureusement, suite à un problème technique (ou une force mystérieuse), l’expérience ne se déroule pas comme prévu. Devenu amnésique, il est condamné à errer dans le temps en incarnant l’identité de différentes personnes entre son année de naissance (1953) et le présent. Heureusement, il demeure lié au présent par son ami, l’amiral Albert Calavicci. Ce dernier lui apparaît sous la forme d’un hologramme dont il est le seul à voir et entendre. Il lui sert notamment d’intermédiaire avec Ziggy (l’ordinateur hybride parallèle créé par Sam dans le cadre du projet Quantum) qui le guide dans son voyage.
Au cours de chaque transfert dans le temps, les deux hommes vont œuvrer pour réparer les erreurs du passé, en tentant d’améliorer la vie des individus incarnés ou rencontrés par Sam, tout en espérant à chaque fois que le prochain saut ramènera le savant « chez lui ».
LES ORIGINES DE LA SERIE
Dès 1979, soit dix ans avant le lancement de « Quantum Leap », Donald P. Bellisario (créateur des séries Magnum, J.A.G., ou encore N.C.I.S) a l’idée d’un scénario original pouvant faire l’objet d’une série télévisée : un savant porteur d’une maladie congénitale se transmettant toutes les deux générations découvre un remède au mal qui sommeil en lui. Il aimerait en faire profiter ses ancêtres. Il se met donc en quête d’un moyen de remonter le temps afin d’inoculer le vaccin à son grand-père. La série ne verra néanmoins jamais le jour, car entre-temps, le producteur se lance dans une nouvelle aventure, celle de Magnum, qui va durer huit ans de 1980 à 1988 sur NBC.
Néanmoins, quand Brandon Tarkoff prend la direction de la chaîne, il est question de lancer des programmes sensiblement différents des autres networks, en misant sur la nouveauté et la qualité. Donald Bellisario propose alors « Code Quantum ». Il évoque rapidement l’idée d’un scientifique propulsé à travers le temps mais l’idée ne semble pas enthousiasmer immédiatement les dirigeants de la chaîne. En effet, aucune série sur le thème de l’exploration du temps n’a jamais rencontré de succès financier aux Etats-Unis. Les problèmes de budget avaient notamment signé la mort d’ « Au Cœur du Temps ».
Réticents, dans un premier temps, les responsables de la chaîne écoutent poliment le producteur exposer ses idées. Mais Bellisario se veut rassurant : Code Quantum sera avant tout une anthologie dramatique, et non une œuvre de science-fiction pure, reposant sur des personnages différents chaque semaine, à l’exception des deux protagonistes : un savant, qui voyage dans le temps et Al, l’observateur qui lui sert de lien avec l’époque d’où il vient.
« Le problème qui se posait était celui de la limite de la période dans laquelle le héros pouvait voyager » explique Donald Bellisario. « Il m’est vite apparu que le saut dans le temps ne devait pas être trop important pour rester crédible. Il était impossible de faire accepter par le téléspectateur que Sam Beckett se retrouve à l’époque des guerres napoléoniennes. En revanche, si le héros se limitait à l’histoire toute récente, s’il se retrouvait à une époque où existaient déjà la télé et les voitures, la chose était jouable. C’était la première clé pour Code Quantum. Sam Beckett ne se déplace donc qu’entre le moment où il est né, 1953, et l’époque actuelle ». Cette démarche convainc un peu plus : La perspective de limiter les frais de costume et de décor à dû convaincre les décisionnaires peu enthousiastes.
De plus, pour exposer le concept de la future série, Bellisario avait écrit une première mouture du scénario. La scène s’ouvrait dans le désert du Sud-Ouest des Etats – Unis, un décor immuable depuis des millénaires. Sur le sol, un homme presque nu, frappé de complète amnésie. Une voiture de police se dirige vers lui. De la plaque d’immatriculation, l’homme déduit qu’il est en 1955. Grimpant dans le véhicule à l’invitation du shérif, il aperçoit un cadavre à l’arrière. Et tandis qu’il constate que le reflet dans le rétroviseur n’est pas le sien mais celui d’un indien, il apprend qu’on l’accuse de meurtre.
Dès cette première version, les bases de Code Quantum étaient déjà posées. La chaîne finit ainsi par accepter le concept et espère surfer sur le succès de « Retour vers le Futur ».
UN PARFAIT DUO
Pour trouver les deux acteurs principaux qui devaient jouer les protagonistes de la série, le Dr Sam Beckett et Albert Calavicci, Donald P. Bellisario a fait procéder à des auditions.
« Scott Bakula est venu aux auditions » explique Donald Bellisario. « Je ne le connaissais pas du tout. C’était un acteur de théâtre et de comédies musicales, qui avait été nominé aux Tony Awards. Quand il a eu terminé son essai, j’ai dit à mon équipe : « c’est le gars qu’il nous faut ! ». Acteur de talent, Scott parviendra à incarner avec succès près d’une certaine de personnages différents dans des registres différents. Il parvient tant à être chanteur qu’à se travestir en femmes voire même à jouer le rôle d’un chimpanzé. Son interprétation de Sam Beckett lui vaudra en 1992, le Golden Award du meilleur acteur de série dramatique, ainsi que deux années consécutives, le Trophée de l’Association des téléspectateurs, pour une télévision de qualité. Il a par ailleurs été sélectionné à deux reprises aux Emmy Awards et pour le Golden Globe Award. Depuis Code Quantum, Scott mène une illustre carrière à la télévision. Parmi ses plus grandes réussites, il a notamment joué le capitaine Jonathan Archer dans les 98 épisodes de « Star Trek : Enterprise » de 2001 à 2005 et dans « Men of certain age » entre 2009 et 2011.
Quant au rôle d’Al, il avait intéressé plusieurs acteurs, James Coburn et Malcom Mc Dowell entre autres. Dean Stockwell venait de tourner dans le film de Jonathan Demme « Veuve mais pas trop » avec Michelle Pfeiffer, Joan Cusack et Matthew Modine. Star depuis l’enfance, il avait également joué par le passé dans des films tels que « Dune » et dans de nombreuses séries télévisées à succès (« Mission Impossible », « Columbo », « La Quatrième Dimension », Mannix », etc). « Il est venu aux auditions, explique Bellisario, ce qui m’a un peu surpris, car, savez-vous, les auditons sont toujours une épreuve difficile pour les acteurs de sa réputation. Il était parfait pour le rôle. J’ai appris plus tard ce qui le motivait autant. C’était un rôle rêvé pour lui, car il a eu deux enfants autour de la cinquantaine. Avec Code Quantum, il pourrait travailler trois jours par semaine, gagner un peu d’argent et passer le reste du temps avec eux ». Grâce à « Code Quantum », Dean Stockwell se fait connaître dans le monde entier et surtout auprès d’une nouvelle génération. Un succès amplement mérité tant son interprétation d’Al est savoureuse : à la fois drôle et dynamique, il est même par moments absolument bouleversant dans le registre dramatique.
Ainsi, dès le pilote une véritable alchimie s’installe entre les deux acteurs. « Nous sommes très proches, nos familles aussi en dehors des studios » expliquait Scott Bakula à Laurent Weill en 1995.« C’est un hasard. Le producteur n’a pas essayé de nous marier « de force ». Chaque fois que je revois des épisodes je comprends comment notre complicité a évolué. Dean adorait ajouter des grimaces vers la caméra comme un enfant. Il mettait de l’ambiance. Nous improvisions aussi beaucoup. Des répétitions, il y en avait un minimum. On nous rappelait à l’ordre si on s’égarait trop ». Dans ce contexte, la complicité entre les deux acteurs fonctionne tellement bien qu’il arrive qu’un épisode banal devienne intéressant en se reposant quasiment uniquement sur cette dite alchimie.
MULTIPLES REGISTRES ET RELECTURE DE L’HISTOIRE
Un des atouts majeurs de « Code Quantum » est que la série peut se permettre de multiplier les registres grâce à son concept de base. Code Quantum peut être un film noir, une comédie musicale, un récit proprement fantastique, un film sportif, un film de guerre, etc.
Dans ce contexte, le téléspectateur est invité à revisiter trente années de l’histoire des Etats-Unis à travers la vie d’illustres inconnus. L’aspect pédagogique est évident : nul doute que les Américains découvriront mieux leur passé récent en y suivant les aventures de Sam Beckett. « L’amour n’a pas de couleur » leur remettra en mémoire les émeutes de Watts, le quartier noir de Los Angeles en 1965. Mais « Code Quantum » est aussi l’occasion de parcourir dans le désordre trente ans décisifs dans la lutte des droits civiques des minorités : les afro-américains dans « Miss Melny et son chauffeur », ou « l’Amour n’a pas de couleur », les indiens dans « Aux portes de la mort » voire les imigrés mexicains dans « Au bout du rêve ». A chaque fois, la situation est revisitée telle qu’elle pouvait être, d’une façon qui souligne l’absurdité des discriminations. Le personnage qui subit ces mauvais traitements au nom d’une différence, c’est pour nous Sam, anglo-saxon blanc protestant typique, ce qui a tendance à marquer les esprits les plus intolérants.
Ainsi, tandis que trop nombreuses séries n’ont pour but de fidéliser le téléspectateur par tous les moyens, « Code Quantum » ne cessera de repousser durant cinq années les limites d’une série télévisée en prenant des risques.
ANNULATION DE LA SERIE
Si le succès critique est rapidement au rendez-vous, le succès public n’est pas à la hauteur des attentes de NBC. Dans le classement des séries « Code Quantum » n’atteindra au mieux que la 42ème place. Pour Scott Bakula, avec le recul les audiences de l’époque paraitraient aujourd’hui triomphales « Les bons soirs, nous avions 21% de parts de marché » explique l’acteur. « En moyenne, 18%. Je ne sais pas trop quoi penser de ce que le paysage audio-visuel est devenu aujourd’hui. La prolifération des chaînes, des émissions, des équipes techniques et artistiques fait qu’il n’est plus question d’obtenir aujourd’hui les indices d’écoutes qu’on pouvait espérer dans les années 1990 ».
Il faut par ailleurs rappeler que la série était une cible de choix pour les publicitaires dans la mesure où elle fonctionnait bien auprès de la tranche des 18 – 49 ans. « Code Quantum » grimpera même dans cette catégorie pour atteindre la quatrième place des émissions les plus regardées.
Néanmoins, quand vient l’heure de financer la production de la cinquième saison, la chaîne demande à Bellisario de doper l’audience du show. Concrètement, NBC souhaite qu’il conçoive des épisodes dans lesquels Sam se retrouve mêlé à des personnalités réelles (Lee Harvey Oswald, Marylin Monroe, Elvis Presley) mais également de développer davantage de scénarios orientés « Science-fiction » (notamment en raison du grand succès d’audience de « Star Trek : La nouvelle génération »). Bellisario s’exécute et parvient même à ne pas trahir l’état d’esprit original de la série. Néanmoins, la chaîne n’est toujours pas convaincue des résultats de l’audimat. En cours d’année, NBC prévient donc Bellisario : cette cinquième saison sera probablement la dernière. Il lui est ainsi conseillé d’écrire un épisode de conclusion.
Le producteur se livre à un exercice de style difficile, il doit terminer la série de façon satisfaisante, tout en laissant la porte ouverte à une éventuelle reconduction. Bellisario demande même au président de prévoir un créneau horaire spécifique pour cette diffusion. Mais il n’y a pas de miracle. NBC annonce l’arrêt de la série à la presse, après 96 épisodes. C’est ainsi que Bellisario l’apprendra. A lui de prévenir les acteurs.
Interrompue dans sa pleine maturité, la série aura apporté une bouffée d’air frais à la télévision américaine. A chaque épisode, décor, contexte et genre changeait sans prévenir. Peu de séries auront eu une telle souplesse dans les années 1990 et encore aujourd’hui.
A PROPOS DU DERNIER EPISODE (ATTENTION : SPOILERS)
De toutes les séries qu’il ait écrites, « Code Quantum » est probablement celle où Donald Bellisario y a mis le plus de lui - même. A ce propos, le dernier épisode est très révélateur.
« Je n’avais pas envie d’écrire un épisode qui révélait tout » explique Donald Bellisario. «J’y donne quelques raisons pour lesquelles Sam se transmute. Le message auquel je crois profondément, de la série est simple : chacun est responsable de sa vie, peu importe que nous croyons que le destin, Dieu ou que ce soit, nous impose certaines épreuves ».
Le bar dans lequel se déroule le dernier épisode, « Le Grand Voyage », est une réplique de celui que tenait le père de Donald Bellisario et l’acteur qui incarne le barman ressemble étrangement à son père. « Pour cet épisode, je voulais essayer de remonter jusqu’aux racines de ce qui a poussé Sam à voyager. Pourquoi, me suis-je dit alors ne pas retourné là ou tout à commencé ? Alors, tous les personnages, leur nom, leur personnalité et leur morale sont nés ici, dans le bar de mon père ».
DIFFUSION FRANCAISE
Diffusé avec succès dans de nombreux Pays (la Grande Bretagne, le Japon), « Code Quantum » l’a été tardivement en France. Sa carrière était achevée aux Etats-Unis quand les premiers épisodes apparurent sur nos écrans dès septembre 1993, d’abord sur Série Club qui les diffusait hebdomadairement, puis sur M6 qui, avec son rythme quotidien (de 18 à 19h). Le retard était comblé et notre pays devint ainsi le premier outre Atlantique à diffuser la série dans son intégralité.
Seules les trois premières saisons avaient été achetées initialement à Universal Television. Mais l’accueil très favorable du public amena rapidement M6 à doubler le reste afin de ne pas interrompre la diffusion quotidienne.
ANECDOTES
* Le Dr Sam Beckett parvient à réintégrer son époque dans le premier épisode de la quatrième saison intitulé « Bon en arrière ». Il devient ainsi temporairement l’observateur, tandis qu’Al est désormais le voyageur du temps.
* Parmi les 96 épisodes de la série, Scott Bakula a été amené à incarner 9 fois le rôle d’une femme.
* Au cours de la cinquième saison, Sam et Al vont se retrouvés confrontés à deux envoyés du mal, Alia et Zoey. La première voyageant dans le temps et la seconde occupant le poste d’observatrice. A trois reprises leurs chemins se croiseront.
* Durant ces cinq années de production, la série accueillera de nombreux visages célèbres de la télévision US : Roddy McDowall (« La Planète des Singes »), Jennifer Aniston (« Friends »), le Dr Ruth (célèbre sexologue américaine), Jason Priestley (« Beverly Hills »), Teri Hatcher(« Desperate Housewifes », Loîs et Clark »), Brooke Shields (« Susan ! »)
* Tom Selleck fut approché par la production pour savoir si il était intéressé de prêter son reflet le temps d’un épisode dans lequel Sam serait Magnum. Malgré l’accord de l’acteur, l’épisode en question ne sera jamais réalisé. Universal s’y opposera pour des raisons de droits.
* Près d’une décennie après le dénouement de « Code Quantum », Scott Bakula et Dean Stockwell se sont retrouvés dans la série « Enterprise » (la dernière adaptation de « Star Trek ») le temps d’un épisode de la première saison intitulé « Détenus ».
* 5 romans adaptés de la série télévisée ont été édités aux éditions « J’ai Lu » en France. L’excellent « Prélude » écrit par Ashley Mc Connell se déroule notamment avant l’épisode pilote et dévoile les origines de la série.
* 13 comics sont parus aux Etats-Unis chez Innovation. Dans l’une des bandes dessinées, le Dr Beckett se retrouve notamment dans le corps d’un extraterrestre.
* A l’occasion du vingtième anniversaire de la série télévisée, un fan film intitulé « A Leap to Di for » a été produit en 2009 par Rascofilms. Doté d’un budget conséquent pour une telle production (environ 30 000 dollars), cette nouvelle aventure suit les aventures du Dr Samuel Beckett (incarné par Joshua C.Ramsay) se retrouvant projeté dans la peau d'un homme de 26 ans le 30 août 1997 à Paris, 24 heures avant le tragique accident de Lady Diana. A noter que la scénariste de la série, Deborah Pratt, reprend la voix de l’ordinateur Ziggy.
* Depuis l’arrêt de la série beaucoup de projets de retour ont été évoqués. Ainsi, en 2002, SCI-FI annonce souhaiter produire une série utilisant le concept des épisodes originaux mais avec une femme dans le rôle du voyageur du temps. Plus récemment, à la Comic Con de San Diego en juillet 2010, Scott Bakula évoque des avancées sur un projet de film : « La bonne nouvelle c’est que Don est actuellement en train de travailler sur le scénario du film et qu’il a énormément de temps puisqu’il est producteur à Hollywood et il veut le faire...Il était temps. Mais, j’ai toujours pensé que ça allait arriver, et c’est arrivé. Mais Dean et moi-même aurons en quelque sorte un petit rôle dedans. ». Néanmoins, aucune nouvelle concernant ce projet n’a été évoqué depuis.
CONCLUSION
« Code Quantum » est un monument incontournable de la télévision américaine. Portée par le duo Scott Bakula / Dean Stockwell, la série est un divertissement de grande qualité, profondément humaniste et permettant de (re)découvrir l’histoire récente des Etats-Unis d’un point de vue totalement inédit.
En résumé, SILVER SCREEN vous recommande vivement de vous replonger dans les aventures de Sam et Al !
Sources : Génération Séries (N°39 et 40), "Code Quantum : itinéraire d'un ange gardien" (guide du téléfan)
Présentation de la série "Code Quantum" à l"occasion d'une soirée spéciale sur M6
Interview française de Scott Bakula :
Scott Bakula évoque les Leapers, le fan club de Code Quantum sur le plateau de la Saga des Séries sur M6
Scott à l'occasion d'une convention de fan, une chanson célèbre de la série "Somewhere in the Night"
Le fan film de 2009